Follow-up : Les sciences humaines et sociales et l'innovation

Les défis économiques, sociaux et environnementaux auxquels la Suisse fait face au même titre que le reste du monde élargissent considérablement la fonction et la définition de l’innovation ainsi que les exigences qui lui sont posées. Mais à quoi pourrait ressembler une telle nouvelle compréhension de l'innovation ? La manifestation a réuni des expert·e·s du domaine académique, des industries créatives, de l'administration et de la promotion de l'innovation.

La manifestation s’est basée sur l’étude « L’apport des sciences humaines et sociales à l'innovation en Suisse », publiée fin février par le Secrétariat d’Etat à la formation, à la recherche et à l’innovation. Il s’agit d’un premier rapport substantiel qui examine les relations entre les sciences humaines et sociales et l'innovation en Suisse. Les quatre auteurs de l'Université de Neuchâtel – Hugues Jeannerat, Olivier Crevoisier, Gaël Brulé et Christian Suter – ne nient pas l’importance des constantes inventions industrielles et technologiques, mais concluent que les nouvelles technologies ne sont acceptées et intégrées par la société que si elles sont perçues comme faisant sens.

Reportage vidéo « Créer le changement »

Pour remplacer les interventions initialement prévues pour le colloque, un reportage vidéo (39 minutes) a été produit en amont et publié quelques jours avant la tenue de la table ronde. Dans la vidéo, une bonne douzaine de chercheurs et chercheuses et d’expert·e·s du domaine de la pratique et de l’encouragement de l’innovation soulignent les aspects institutionnels, juridiques, politiques et économiques essentiels d'une nouvelle compréhension de l'innovation ancrée dans les sciences humaines et sociales.

Le reportage complet (39 minutes) ainsi que des statements et les courtes biographies des expert·e·s qui s'expriment dans la vidéo peuvent être consultés ici.

Table ronde « Quel rôle pour les sciences humaines et sociales ? »

    Impressions

    La table ronde a eu lieu sur la plateforme Webex et a été enregistrée dans un studio de l’Université de Neuchâtel. Environ 150 personnes ont suivi la discussion en direct. Voici quelques énoncés clés des expert·e·s présent·e·s sur le podium (biographies ci-dessous). Un texte détaillé sur l'événement a été publié sur le blog du Conseil suisse de la science.

    Nachhaltiger Wandel: aber wie?

    Gemäss Kwame Anthony Appia gibt es in der Menschheitsgeschichte immer wieder Momente, wo man sich kollektiv entschieden hat, etwas nicht mehr zu akzeptieren, was vorher komplett normal war. In ein paar Jahren oder Jahrzehnten wird es schockierend sein, dass wir so mobil waren, dass Menschen in Fabriken bei der Extraktion der Elemente für unsere elektronischen Geräte sterben mussten. Das Konzept «faire und unfaire» Schokolade wird uns absurd erscheinen. Und warum ist es oft die Jugend, die solche gesellschaftlichen Bewegungen trägt? Vielleicht haben wir weniger, das wir verlernen müssen.(Nora Wilhelm)

    Dort, wo die wirkliche Innovation passiert, das ist nach wie vor wenig sichtbar. (Ingrid Kissling-Näf)

    La société a des problèmes, le monde académique a des disciplines

    Au niveau interdisciplinaire, il y a eu passablement d’innovations. Prenons par exemple le master en migration à l’Université de Neuchâtel. Il y a plus de structures avec des instituts et des centres. Ce qui me semble le plus lacunaire en Suisse, c’est qu’il faudrait plus de porosité entre la société non académique et le monde académique. Je crois qu’il y a pas mal de choses à faire dans ce domaine. Et la collaboration doit aller au-delà de l’idée que les universitaires fournissent l’expertise… (Ola Söderström)

    Le monde académique n’a pas forcément la vocation de résoudre les problèmes. Il a la vocation de thématiser les problèmes, de les conceptualiser. La résolution des problèmes est de la responsabilité des politiques. (Edouard Bugnion)

    Où est-ce que je trouve de l’argent pour un projet dont je ne sais pas encore quels seront les résultats ? (Nora Wilhelm)

    Was für Produkte für wen?

    Was ist der Sinn und Zweck einer Marke? Was will man wirklich für Produkte aufbauen? Wie sollen sie nachhaltig einen Wert generieren? So kann man mit einem change-Prozess Vieles in Bewegung bringen, angefangen vielleicht mit einer Strategie, die man neu schreiben kann aus Sicht des Kunden, aus Sicht des Menschen, aus Sicht der Nachhaltigkeit. Man muss Entscheidungsprozesse zunehmend bewusst steuern. Heute sind oft kurzfristige Business-Ziele im Vordergrund. (Christina Taylor)

    Where do we go from here?

    Vielleicht ist es nicht nur klug, bei den Geistes- und Sozialwissenschaften auf die Karte Innovation zu setzen. Ich glaube, es gibt so etwas wie Evolution und Tradition, es gibt so etwas wie rekursives Wissen, das genauso wichtig ist für die Beziehung zwischen den Menschen, für das Zusammenleben in der Gesellschaft, und vielleicht sollte man sich auch auf das konzentrieren. (Marco Vencato)

    Necessity is the mother of invention. Innovation wurde jedoch bis Anfang des zwanzigsten Jahrhunderts als gesellschaftlicher Fortschritt verstanden. Hier spielen die Geistes- und Sozialwissenschaften eine elementare Rolle, hier muss man anknüpfen. (Markus Zürcher)

    On n'a pas besoin de nouveaux instruments. Il faut mieux les communiquer. La situation en Suisse est bonne, mail il faut plutôt changer les mentalités. (Ola Söderström)

    Sur le podium

    Edouard Bugnion, Innosuisse

    Edouard Bugnion est professeur à l’EPFL à la Faculté Informatique et Communications ou il dirige le Laboratoire des systèmes de centres de calcul. Il co-dirige par ailleurs le « Swiss Data Science Center », fruit d’une initiative stratégique du Conseil des EPF. Depuis janvier 2017, il est également vice-président de l’EPFL pour les systèmes d’information. Avant de revenir en Suisse et de rejoindre l’EPFL, Edouard Bugnion a passé 18 ans en Californie en tant que chercheur et entrepreneur ; il a obtenu un PhD en informatique à Stanford et a créé deux startups en tant que Chief Technology Officer : « VMware (NYSE : VMW) » et « Nuova Systems », qui ont été reprises par Cisco. Edouard Bugnion est également membre du conseil d’administration de Logitech et de Innosuisse.

    Ingrid Kissling-Näf, Haute école spécialisée bernoise

    Ingrid Kissling-Näf est directrice du Département d’économie de la Haute école spécialisée bernoise. De 2012 à 2017, elle a présidé la Division des sciences humaines et sociales du Fonds national suisse, et de 2007 à 2010 la Commission pour la technologie et l’innovation CTI. Auparavant, elle était secrétaire générale de l’Académie suisse des sciences naturelles. Elle a fait des études en théologie, économie et administration publique à Fribourg, Paris et Lausanne et a obtenu son doctorat en économie à Saint-Gall. En tant que professeure assistante en économie des ressources forestières à l’EPFZ et assistante au Workshop of Political theory and Policy Analysis à l’Université de l’Indiana, elle a traité de manière intensive les questions d’économie des ressources dans les domaines des forêts, de l’eau et de l’énergie. Elle a travaillé pour différents organismes tels que la Commission des parcs nationaux ou le Conseil des ressources génétiques du gouvernement fédéral allemand. Elle est conseillère municipale à Berne et déléguée de l’Unicef.

    Ola Söderström, Fonds national suisse

    Ola Söderström est professeur de géographie sociale et culturelle à l’Université de Neuchâtel. Ses recherches récentes portent, d’une part, sur les relations entre vie urbaine et santé mentale et, d’autre part, sur les politiques de développement urbain dans les villes du Sud. Il est depuis 2013 membre du Conseil de la recherche du Fonds national suisse (FNS) et depuis 2017 président de la Division sciences humaines et sociales du FNS. Il a pris ces dernières années, à ce titre, de nombreuses initiatives pour expliquer et promouvoir le rôle des sciences humaines et sociales (SHS) dans la société. Il est également l’initiateur, avec des collègues en sciences sociales de son université, de différentes publications, manifestations et conférences sur les rapports entre SHS et innovation.

    Christina Taylor, Creaholic SA

    Christina Taylor est directrice associée et copropriétaire de Creaholic SA à Bienne, une fabrique d’innovation suisse qui, depuis 1986, soutient des entreprises clientes de tous les secteurs dans le domaine de l’innovation. La compétence principale de Creaholic SA réside dans l’invention de nouveaux produits et technologies, l’établissement d’une culture d’entreprise innovante et la découverte de nouveaux domaines d’activités. Christina Taylor travaille à l’interface de la conception de l’expérience client (customer experience design), de la transformation et de l’invention de produits. Son expérience va de la branche des télécommunications (Swisscom) aux organisations à but non lucratif. Elle a travaillé pendant cinq ans dans la Silicon Valley à l’Outpost de Swisscom.

    Marco Vencato, Gebert Rüf Stiftung

    En tant que vice-directeur de la Fondation Gebert Rüf, Marco Vencato dirige certains programmes de soutien de la fondation et est, entre autres, responsable du domaine d’activités « First Ventures », le programme successeur de « BREF – Innovation sociale », dont il a accompagné l’outphasing. Auparavant, il a travaillé pour le Conseil suisse de la science et de l’innovation, où il a mené à bien de nombreux projets d’envergure et des évaluations d’organes nationaux de recherche. Après des études d’histoire et de philologie italienne, il a été, entre autres, coordinateur du département d’histoire de l’Université de Bâle pour le projet de recherche européen Cliohres.net dans le cadre du programme « Network of Excellence ». Après des séjours de recherche à Naples et à l’Institut suisse de Rome, il a obtenu son doctorat à l’Université de Bâle auprès du professeur Achatz von Müller en histoire médiévale générale.

    Nora Wilhelm, Collaboratio Helvetica

    Nora Wilhelm est une « faiseuse de changement » engagée depuis l’âge de 15 ans. Pendant sa jeunesse à Genève, en plus de son travail de militante, de volontaire et de stagiaire pour des ONG de développement, elle a participé à de nombreuses conférences de la jeunesse des Nations unies et s’est impliquée dans le Parlement européen des jeunes (PEJ). Elle a dirigé le PJE Suisse de 2014 à 2016. Elle est titulaire d’un bachelor en relations internationales et a suivi de nombreuses formations complémentaires. Elle est la co-fondatrice et animatrice de Collaboratio Helvetica, une initiative dédiée à un nouveau mode de pensée holistique et contribuant à la mise en œuvre de l’Agenda 2030 en Suisse en rassemblant des personnes et des organisations de tous les secteurs. Pour son engagement à libérer le potentiel le plus élevé des personnes et des organisations, Nora Wilhelm a été reconnue par l’Unesco et par l’initiative Cohort 2030 en tant que jeune leader, ainsi que comme « faiseuse de Suisse » par le magazine Annabelle.

    Marie Rumignani, Académie du journalisme et des médias Neuchâtel (modération)

    Double diplômée d’HEC Lausanne (management) et de l’Académie du journalisme et des médias de Neuchâtel (AJM), Marie Rumignani est actuellement assistante-doctorante à l’AJM. Ses recherches portent essentiellement sur l’émergence de l’innovation dans les rédactions et la modernisation des pratiques journalistiques, notamment dans les médias du service public. Elle est également engagée comme collaboratrice scientifique à la Radio Télévision Suisse (RTS) sur des projets stratégiques liés entre autres aux jeunes publics et aux nouveaux formats. Auparavant, elle a travaillé pour plusieurs rédactions en Suisse ainsi qu’au Vietnam dans le cadre d’un volontariat international de la Francophonie. 

    Kilian Stoffel, Recteur de l'Université de Neuchâtel (mot de bienvenue)

    Kilian Stoffel est professeur ordinaire depuis 1997 à la Faculté des sciences économiques de l’Université de Neuchâtel ; il a été élu recteur de l’université en 2016. Il a obtenu une licence en mathématique et physique, puis un diplôme et un doctorat en informatique à l’Université de Fribourg. Il a ensuite travaillé en qualité de chercheur aux États-Unis durant plusieurs années. Ses domaines de compétences sont l’exploration des données (data mining), les représentations des connaissances (knowledge representations), les ontologies et les systèmes d’informations.

    Markus Zürcher, Secrétaire général de l'ASSH (conclusion)

    Markus Zürcher a étudié l’histoire, l’économie et la sociologie à l’Université de Berne et à l’Université de Lancaster en tant qu’étudiant invité. Il a obtenu son doctorat en 1994 à Berne et un master en administration publique (MPA) de l’IDHEAP à Lausanne en 1999. Il travaille pour l’Académie suisse des sciences humaines et sociales depuis 1995 et en est le secrétaire général depuis 2002. Depuis leur fondation en 2006 et jusqu’en 2016, il a assumé la direction des Académies suisses des sciences. De 2000 à 2010, il a été chargé de cours en sociologie et en histoire des sciences sociales aux Universités de Fribourg et de Berne. Depuis 2007, il enseigne la méthodologie de la recherche à la Haute école privée d’économie de Berne (Private Hochschule Wirtschaft PHW).

    Réseau

    La manifestation « Les sciences humaines et sociales et l'innovation » a réuni des chercheurs et chercheuses, des expert·e·s et des spécialistes d’une vingtaine d’institutions pour un échange d’idées et a marqué ainsi une étape vers la constitution d’un réseau consacré à l’innovation dans les sciences humaines et sociales en Suisse.